Communiqué de presse

Accord UE-Mercosur : « Rien de légitime dans cet accord hérité des années 1990 »

Publié le 24 février 2023 , mis à jour le 11 avril 2024

À la veille du Salon international de l’Agriculture, alors que l’accord “viande contre voitures” pourrait revenir sur le devant de la scène dès les prochaines semaines, la Fondation pour la Nature et l’Homme, l’Institut Veblen et INTERBEV tirent une nouvelle fois la sonnette d’alarme sur la dangerosité de ce projet hérité des années 90. Les trois organisations appellent la France à maintenir sa ligne d’opposition au texte et à mettre tout en œuvre pour en bloquer la ratification.

Le renouveau des relations avec le Brésil ne doit pas exempter Emmanuel Macron de respecter ses promesses

La Commission européenne, des eurodéputés et plusieurs États membres dont l’actuelle et la prochaine présidence de l’UE (la Suède et l’Espagne), poussent fortement en faveur d’une ratification d’ici la fin de l’année 2023. De son côté, le nouveau président brésilien, Luiz Inacio Lula da Silva, a clairement exprimé sa volonté de ratifier rapidement l’accord. Il a d’ailleurs invité Emmanuel Macron à participer au Sommet des pays d'Amazonie, qui sera organisé dans les prochaines semaines. En cas de réponse positive de la part du Président français, il est très probable que la question de l’accord commercial entre les pays du Mercosur et l’Union européenne soit abordée.

En septembre 2021, Emmanuel Macron faisait pourtant une promesse ferme : « La France est contre le Mercosur tel qu'il est négocié aujourd'hui et nous le resterons très clairement, pas parce que nous ne sommes pas à l'aise avec nos amis du Mercosur, au contraire, mais parce que par définition, cet accord tel qu'il a été conçu et pensé, ne peut pas être compatible avec notre agenda climatique et de biodiversité ». (Discours de clôture du Congrès mondial de la nature).

La FNH, l’Institut Veblen et INTERBEV appellent le président de la République à maintenir son opposition au texte, en raison des risques sanitaires, environnementaux et économiques inacceptables que fait peser ce projet d’accord :

« Le maintien de l’opposition de la France à cet accord en l’état constitue un test grandeur nature de sincérité des discours récents sur le climat, la protection de la biodiversité et la réciprocité des normes de production sanitaires et environnementales comme enjeu de souveraineté et d’alimentation durable. Cela suppose d’abord de s’opposer aux manœuvres de la Commission qui visent à le découper pour mettre fin au droit de véto d’un seul État membre sur le volet commercial du texte.»

Stéphanie Clément-Grandcourt, directrice générale de la Fondation pour la Nature et l’Homme, Mathilde Dupré, co-directrice de l’Institut Veblen et Emmanuel Bernard, éleveur bovin et président d’INTERBEV Bovins

En l’état, la logique et le contenu de l’accord vont toujours à l’encontre de l’Accord de Paris et du Pacte vert européen

Les trois lignes rouges tracées par le Gouvernement sur le climat, la déforestation et le respect de standards sanitaires et environnementaux essentiels pour les produits agroalimentaires importés restent d’actualité. L’alternance politique et l’adoption d’un nouveau règlement européen sur la déforestation pourraient contribuer à améliorer la situation, mais cela ne suffira pas pour prévenir les impacts écologiques et sociaux anticipés de cet accord hérité des années 1990.

Selon un rapport de l’Institut de l’Elevage1 publié en octobre 2022, les pays du Mercosur détiennent 27 % de la couverture forestière mondiale2 et de 60 % de la vie terrestre mondiale3. Il apparaît ainsi difficile de leur demander de tenir leurs engagements en matière climatique et de biodiversité, tout en augmentant la pression résultant de l’augmentation de la demande mondiale et en particulier européenne en denrées agricoles, y compris en viande bovine.

En outre, sur le respect des standards sanitaires et environnementaux essentiels, tout reste à faire. Dans sa version actuelle, l’accord UE-Mercosur donnerait un accès préférentiel au marché européen à des denrées produites avec des pesticides ou des antibiotiques activateurs de croissance interdits dans l’UE, et selon des règles bien moins disantes en matière de traçabilité et de bien-être animal.

En effet, 27 % des pesticides utilisés par les éleveurs brésiliens sont strictement interdits par la réglementation UE4. Par ailleurs, l’utilisation d’antibiotiques en tant que stimulateurs de croissance est largement répandue en élevages bovins viandes. Comme relevé lors du dernier audit de la Commission européenne en 2018, certains antibiotiques comme le monensin, d’usage légal au Brésil et répandu comme additif alimentaire, sont en effet interdits en UE depuis 2006.

Sources

1.rapport de l’Institut de l'élevage Viande bovine : le Mercosur privilégie toujours plus l’export (octobre 2022)

2.D’après l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) 

3.D’après le Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE)

4.Selon le rapport de l’Institut de l'élevage Viande bovine : le Mercosur privilégie toujours plus l’export (octobre 2022)

L'article vous a été utile pour mieux comprendre cette actualité ?

Pour approfondir le sujet

L'Accord UE-Mercosur promet une catastrophe environnementale
Accord de commerce UE-Mercosur : un accord perdant-perdant