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Le Parlement vote la réautorisation des pesticides néonicotinoïdes, un recul historique

Publié le 30 novembre 2020

Dans la soirée du 4 novembre lors de la lecture définitive du projet de loi, le Sénat a donné son feu vert final à la réautorisation des néonicotinoïdes. Malgré l’opposition déterminée de nombreux sénateurs et sénatrices, une majorité entérine une décision qui met à mal la biodiversité, déjà dans un état catastrophique, et la durabilité de nos pratiques agricoles. Face à ce recul historique, 22 organisations, dont la FNH, continuent d’alerter les pouvoirs publics : elles n’en resteront pas là et se mobiliseront pour un avenir agricole respectueux de la planète, de la santé et des emplois.

Néonicotinoïdes : pourquoi la réautorisation de ces pesticides fait débat ?

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Un vote sans surprise…

La soirée du 4 novembre aura été marquée par un dernier vote : le Sénat valide le résultat de la commission mixte paritaire, tout comme l’a fait l’Assemblée nationale, la réautorisation des néonicotinoïdes a 53 de voix de différence (183 contre 130). C’est un résultat sans surprise puisque en première lecture (27-28 octobre), les sénatrices et sénateurs de droite et du centre avaient majoritairement voté en faveur de cette loi qui enterre ainsi les lois votées en 2016 (loi biodiversité) et 2018 (loi agriculture et alimentation issue des Etats Généraux de l'Alimentation) et qui instauraient pourtant l’interdiction des néonicotinoïdes (ainsi que toutes les substances ayant le même mode d’action).

… alors même qu’il existait d’autres solutions pour soutenir la filière betterave en difficulté !

La FNH se désole de cette décision alors qu’elle a largement défendu auprès des parlementaires le fait qu’en plus de mettre en péril la biodiversité, la filière apicole et l’avenir de notre agriculture, la réautorisation de ces pesticides n’était pas la solution pour sauver la filière betterave.

Pour rappel :

  • D’autres solutions de court et de long terme existent pour soutenir la filière betterave et l’aider à trouver des alternatives. Par exemple, indemniser les pertes des agriculteurs (cela suppose 77,5 millions d’euros) et conditionner ces aides à la mise en place de pratiques qui préparent l’avenir : allongement des rotations, planter des haies, retarder les semis…
  • La filière betterave subit des difficultés déjà depuis depuis la fin des quotas sucriers il y a 3 ans. La production sucrière française a chuté de 16% en 2019. Les prix mondiaux du sucre sont en berne et la course à la concurrence mondiale s’accélère toujours plus. 4 sites ont fermé ces dernières années. Malgré la baisse des surfaces cultivées et les cours du sucre bas, la France est le premier pays exportateur de sucre en Europe avec 50% de la production exportée.
  • La disparition des abeilles est une aberration pour les écosystèmes, mais aussi pour notre économie : elle coûterait 2,9 milliards d’euros à la France et mettrait en péril notre sécurité alimentaire ! En effet, 75% de notre nourriture dépend directement des pollinisateurs…
  • La loi biodiversité de 2016 qui interdisait l’utilisation de néonicotinoïdes, laissait 4 ans pour trouver des alternatives agronomiques. Malheureusement, il n’y a pas eu assez de recherches effectuées pour mettre en place ces alternatives. Le gouvernement le reconnaît, les filières et la science « n’ont pas fait le boulot», « l’échec est collectif ». Alors comment être certains qu’après cette première dérogation, une deuxième ne sera pas demandée d’ici 3 ans ?
  • Autoriser les néonicotinoïdes, n’est pas une petite dérogation… elle suppose 450 000 hectares de surfaces traitées par an avec une substance toxique pour l'environnement et la santé. Plus d’un millier d’études attestent de la contamination et la persistance des néonicotinoïdes dans les cours d’eau et les sols, bien au-delà des parcelles traitées.
  • Les pollinisateurs qui nichent dans le sol et qui butinent dans les plantes aux alentours des cultures traitées sont donc exposés aux effets nocifs de ces pesticides. Même à des doses sublétales, ces pesticides perturbent leurs sens de l’orientation, leur faculté d’apprentissage et de reproduction, contribuant ainsi au dépérissement des colonies.
  • 30% des ruches périssent chaque année en France. De même, la production nationale de miel est en chute libre, divisée par trois en 20 ans. Réautoriser les néonicotinoïdes c’est favoriser la filière betterave au détriment de la filière apiculture.

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