Les mesures à mettre en place dès maintenant sont sur la table. Elles sont attendues depuis des mois dans tous les territoires. Ce sont, pour n’en citer que quelques-unes : la programmation de la fin de vente des voitures essence et diesel, la contribution des camions et des avions à la lutte contre la pollution et le dérèglement climatique, le forfait mobilité durable pour tous, les zones à faibles émissions, les équipements et stationnement vélo, la modernisation du train, les bornes de recharge pour voitures électriques... Des propositions travaillées, négociées pendant des mois entre l’Etat et nos organisations, ONG, syndicats, depuis septembre 2017 et les Assises de la mobilité.
Doit-on encore rappeler que le secteur des transports est le premier émetteur de gaz à effet de serre en France comme en Europe, et que ses émissions ne cessent de croître ? Le trafic routier, sur lequel nous avons misé depuis plusieurs décennies pour les déplacements du quotidien, pour lequel nous avons adapté les villes et les territoires, représente le principal contributeur à la pollution de l’air. Tant et si bien que plus personne ne conteste l’urgence d’agir, pour vivre mieux, tout simplement.
Mais le temps presse. D’après les experts du GIEC, il nous reste une douzaine d’années tout au plus, pour réduire drastiquement les émissions de gaz à effet de serre et maintenir le réchauffement climatique à 1,5°C. Reporter la responsabilité à plus tard, nier les recommandations des scientifiques, serait une condamnation ! C’est maintenant qu’il faut se projeter. La politique gestionnaire et de court terme n'a plus de pertinence face à l'urgence écologique et sociale qui caractérise notre époque.
Malheureusement, après le passage au Sénat et les récentes discussions en Commissions à l’Assemblée nationale aucune raison de se réjouir. Certes, des outils sont là, de la zone à faibles émissions au forfait mobilité, mais ils restent vagues ou optionnels. Certes, la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050 est mentionnée, mais sans un programme solide, combinant des étapes et des moyens. Quelle erreur !
La question de la fin de vente des voitures essences et diesel en est un exemple criant. De manière pragmatique, que prévoit la loi d’orientation pour accompagner et accélérer la nécessaire transition du secteur automobile, la mutation des emplois et des compétences, l’accompagnement des travailleurs ? Rien. Sans mobilisation au plus tôt des acteurs du secteur, rien ne garantit une transition juste, favorable à l'économie, à l'emploi, et surtout à la santé et au mieux-vivre.
Autre exemple, le forfait mobilité - dispositif phare pour inciter financièrement les salariés à sortir de l’autosolisme, choisir le train, le covoiturage, le vélo, ou encore combiner les modes de déplacement – reste optionnel. Et pourtant, les bénéfices de cette mesure ont été calculés et prouvent leur efficacité : pour le report modal vers le vélo c’est moins 15% d’arrêts maladie et 126 euros économisés par la sécurité sociale par salarié concerné. Il serait incompréhensible de ne pas faire des questions de mobilité un objet de négociation incontournable dans les entreprises et les administrations.
Là où les incitations au vélo ont été expérimentées, le nombre de salariés optant pour cette solution a doublé les premières années. Lancé à l’automne 2018, le Plan vélo connaît également un succès remarquable dans des centaines de collectivités de toutes tailles. Du jamais vu en France !
On le voit, le contexte n’a jamais été aussi favorable et la société française aussi réactive. Chers députés, saisissez cette opportunité pour donner tout son sens à la Loi Mobilité. C’est une occasion unique d’inscrire dans l’histoire le virage de la transition écologique et sociale.
- Morgane CREACH, Directrice Réseau Action Climat
- Alain GRANDJEAN, Président de la Fondation Nicolas Hulot pour la Nature et l’Homme
- Philippe PORTIER, Secrétaire national CFDT
- Olivier SCHNEIDER, Président de la Fédération des Usagers de la Bicyclette.
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