La condition ? Repenser notre système agricole et mettre en place des techniques agroécologiques. Par exemple, l’allongement des rotations, la diversification des cultures, ou encore la destruction physique (et non chimique) des mauvaises herbes seront clés pour y parvenir.
Si enclencher ce changement de paradigme n’est pas simple, il est pourtant indispensable. Le courage politique attendu requiert la mise en œuvre d’un plan ambitieux de réduction des pesticides en France, avec des moyens financiers à la hauteur pour accompagner les agriculteurs.
Voici les mesures que nous défendons :
#1. Inclure l’objectif de sortie du glyphosate.
#2. Fixer l’objectif de réduction de 50 % des pesticides en prenant comme seule référence les quantités utilisées en 2009, plutôt que celles de 2015-2017, qui représentent les plus hautes valeurs de ces 15 dernières années !
#3. Imposer un système de bonus et de pénalités pour inciter l’agro-business à réduire drastiquement leurs ventes de pesticides et proposer des alternatives agroécologiques.
#4. Lancer une réflexion globale sur la refonte de notre système agricole, aujourd’hui trop dépendant de l’usage des pesticides (monocultures, productions intensives…), pour aller vers des systèmes basés sur l’agroécologie.
#5. Refuser l’entrée sur le marché européen d’aliments produits avec des pesticides interdits en Europe. Une situation dramatique qui fait subir à nos agriculteurs une concurrence déloyale.
Dans un nouveau rapport, l’Institut Veblen, le Bureau européen de l’environnement et la Fondation pour la Nature et l’Homme analysent la réglementation actuelle et formulent des recommandations pour en finir avec l’importation de produits traités avec des pesticides interdits en Europe.
Pesticides néonicotinoïdes : comment donner de l’ambition aux mesures miroirs européennes ?
Télécharger la synthèse (format pdf - 2 Mo)En février 2023, l’UE a adopté pour la première fois un règlement comportant une mesure miroir sur des pesticides pour un motif environnemental. Objectif : interdire d’ici 2026 l'importation de produits agroalimentaires contenant des traces de thiaméthoxame et de clothianidine, deux pesticides néonicotinoïdes (que l’on retrouve notamment dans le thé, les laitues ou les cerises pour le premier ou le thé, les herbes aromatiques, le riz ou le raisin pour le second), prohibés dans l’UE en raison de leur toxicité, notamment sur les pollinisateurs. Une décision qui va dans le bon sens, mais dont la portée et la robustesse devraient être renforcées pour les raisons suivantes :
Interdits à l’utilisation sur le sol européen, certains pesticides sont pourtant toujours fabriqués par des entreprises européennes afin d’être exportés. Une pratique injustifiable sur le plan éthique qui renforce la probabilité d’importer des produits contenant ces mêmes pesticides sur le marché européen. En France, une interdiction partielle a été adoptée dans la loi EGAlim et mise en œuvre début 2022. La Belgique vient de prendre une décision du même ordre. Des discussions sont en cours pour des mesures d’interdiction de ces exportations en Allemagne et au niveau communautaire.
Le règlement européen couvre deux néonicotinoïdes : le thiaméthoxame et la clothianidine. Les deux autres molécules que sont le thiaclopride et l’imidaclopride (qui fait partie des pesticides interdits dans l’UE principalement vendus dans les pays tiers), échappent ainsi au règlement. Pire, les produits contenant des résidus d’imidaclopride tels que les canneberges, les haricots ou le houblon, bénéficient même d’une tolérance accrue à l’importation.
Heureusement, un récent arrêt de la CJUE pourrait y mettre un terme.
L’approche par les LMR risque d’amoindrir l‘efficacité du règlement et pourrait nuire à sa solidité juridique. Une interdiction totale d’importer des produits contenant des pesticides interdits, pour des raisons environnementales légitimes, pourrait s’avérer bien plus efficace pour protéger la biodiversité et la santé humaine.
Cet accord de commerce encourage à la fois les exportations européennes de pesticides interdits vers les pays du Mercosur et les importations de denrées agricoles traitées avec ces produits interdits qui reviennent directement dans les assiettes des Européens.
Nos trois organisations recommandent de :
Alors que l’Assemblée Nationale a adopté, ce mardi 13 juin, à une immense majorité, une résolution transpartisane contre la ratification de l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur, la Fondation pour la Nature et l’Homme INTERBEV et l’Institut Veblen joignent une nouvelle fois leur voix pour appeler Emmanuel Macron et son Gouvernement à suivre, sans ambiguïté, la position exprimée par les députés. Le Gouvernement doit, également, protéger le droit de véto de la France en bloquant toute tentative de modification, par la Commission européenne, des règles démocratiques initialement prévues pour la ratification de l’accord.
C’est un vote d’une importance majeure, qui a eu lieu hier soir dans l’hémicycle de l’Assemblée Nationale au lendemain de l’annonce, par la Présidente de la Commission européenne en visite au Brésil, d’une ratification de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur “au plus tard d’ici la fin de l’année” ! A quelques jours de la rencontre prévue à Paris entre Lula et E. Macron[1], les députés ont donc pressé le Gouvernement de s’opposer fermement à cette ratification[2]. Ceci, en dépit des ajustements cosmétiques ajoutés par la Commission européenne dans un “instrument additionnel” non-contraignant[3].
✅ Proposition de résolution relative à l'accord commercial entre l'Union européenne et le Mercosur
— Assemblée nationale (@AssembleeNat) June 13, 2023
🗳️ L'Assemblée nationale a adopté.
🔎 En savoir plus : https://t.co/ZrNJfPQJZ2 #DirectAN pic.twitter.com/hQzs3NnhgF
Parmi les exigences formulées par les députés : le Gouvernement devra bloquer toute tentative de modification, par la Commission européenne, des règles démocratiques initialement prévues pour la ratification de l’accord. Ceci, pour que la France conserve son véto, lors du seul et unique vote qui doit avoir lieu au Conseil de l’Union européenne sur l’intégralité de l’accord. Et que les Parlements nationaux conservent, eux aussi, leur pouvoir de bloquer l’accord.
Cette demande est d’autant plus importante qu’il existe un précédent récent, sur le sujet : pour “simplifier” la ratification d’un traité de libre-échange conclu avec le Chili, la Commission européenne a découpé l’accord conclu pour en isoler son chapitre commercial et ne soumettre ce chapitre qu’à un simple vote à la majorité qualifiée, au Conseil de l’Union européenne, tout en court-circuitant les parlements nationaux. Ce chapitre commercial, présenté comme un “accord intérimaire”, s’appliquerait alors sans que les Parlements nationaux ne soient consultés.
C’est donc, notamment, pour s’assurer que la France bloquera toute tentative similaire en ce qui concerne la ratification de l’accord entre l’Union européenne et le Mercosur, que cette résolution a été adoptée hier.
Au regard de l’accélération du calendrier de ratification annoncée et de la détermination exprimée par la Présidente de la Commission européenne à ratifier cet accord climaticide et destructeur pour nos agriculteurs[4], la Fondation pour la Nature et l’Homme, INTERBEV et l'Institut Veblen soutiennent pleinement cette demande : une telle manoeuvre serait injustifiable au plan démocratique et totalement contraire aux engagements pris et répétés par Emmanuel Macron depuis 2019, au sujet de cet accord.
Sources
[1] Selon l’AFP, la rencontre devrait avoir lieu le 22 juin à Paris. Lula à Paris fin juin pour rencontrer Macron (lefigaro.fr)
[2] Le Gouvernement français envoie des messages contradictoires sur l’accord selon qu’il s’exprime à Paris, à Bruxelles ou dans les pays du Mercosur. "L'accord avec le Mercosur contient des dispositions très favorables à nos entreprises. C'est pourquoi nous n'avons jamais été opposés à sa signature" a par exemple déclaré le ministre du Commerce O. Becht le 10 juin, Paris is warming up to EU-Mercosur deal, but slowly – POLITICO
[4] Lire le rapport “UE-Mercosur : les dangers d’une ratification de l’accord de commerce en l’état” - INTERBEV, Fondation pour la Nature et l’Homme et Institut Veblen. Mars 2023.
Alors que l’Assemblée Nationale devrait se prononcer officiellement, mercredi 13 juin à 17 heures, contre la ratification de l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Mercosur qui, “en l’état” ne contient aucune garantie sanitaire et environnementale, le Ministre délégué en charge du Commerce extérieur, Olivier BECHT, se rend au Brésil cette semaine pour y rencontrer plusieurs membres du Gouvernement. Un déplacement qui questionne INTERBEV, l’Institut Veblen et la Fondation pour la Nature et l’Homme mobilisés ensemble pour éviter l’adoption d’un accord anachronique et climaticide
Pour INTERBEV, l’Institut Veblen et la Fondation pour la Nature et l’Homme, il est urgent que le Gouvernement fasse preuve de plus de transparence et de cohérence sur ce sujet : la France ne peut pas se dire très opposée à l’accord UE-Mercosur et laisser supposer le contraire lorsqu’elle s’exprime à Bruxelles ou à Brasilia[1].
Nos trois organisations attendent donc que la résolution soumise au vote des députés le 13 juin à l’Assemblée Nationale - qui liste précisément les “lignes rouges” empêchant toute ratification de l’accord UE-Mercosur en l’état - devienne, si elle est adoptée, la position officielle de la France sur cet accord, défendue indifféremment quel que soit le lieu où elle est exprimée. Le Gouvernement français doit en outre tout faire pour dissuader la Commission européenne de passer en force au Conseil avec un découpage de l’accord ou le recours à un accord intérimaire sur le volet commercial.
Sources
[1] Catherine Colonna en Février (source : Brésil : le pays renoue avec la France après le départ de Bolsonaro et le retour de Lula (sudouest.fr)
« Nous y tenons (à cet accord). Nous sommes plus confiants désormais dans la capacité du Brésil d’accepter dans un futur accord le respect des principes sociaux et environnementaux », a dit Catherine Colonna. Mais « il y a encore beaucoup de travail technique à faire et nous attendons les propositions de la Commission européenne », a-t-elle ajouté, alors que Mauro Vieira avait souhaité voir l’accord ratifié avant la fin du premier semestre.
Peut-être est-ce justement parce qu’ils y ont travaillé et connaissent bien les travers des discours souvent alarmistes sur l’écologie dans les médias qu’à 30 et 35 ans, Mélanie et Kern ont souhaité s’en affranchir. Avec Les Joies Sauvages, la chaîne Youtube qu’ils ont créée en 2022, ils racontent, via l’œilleton de la caméra, les histoires de ceux et celles qui font le choix de la transition (agricole notamment) dans la vraie vie. Mission réussie, le ton est décalé mais le message reste percutant et positif ! Un projet soutenu par notre programme Génération Climat.
Avec Génération Climat, la Fondation accompagne les jeunes vers l’engagement et la création d’initiatives pour le climat et la biodiversité. Depuis 2016, nous avons aidé plus de 1 000 jeunes à concrétiser leur projet !
Pour Mélanie et Kern, l’écologie est un terme tellement utilisé aujourd’hui que parfois, on ne sait plus bien ce qu’il recouvre. Qui dit écologie pense plutôt aux crises auxquelles on l’associe : climatique, perte de biodiversité, pénuries d’eau, épuisement de matières premières, précarité alimentaire… mais l’écologie c’est aussi l’ensemble des solutions expérimentées par celles et ceux qui ont déjà engagé une transition et tentent localement de trouver des solutions. C’est bien cela que Mélanie et Kern veulent mettre en lumière :
L’idée avec Les Joies Sauvages c’est de sortir du discours technique, scientifique ou même éthique et de montrer l’écologie comme elle est vécue au quotidien. Cela signifie de proposer une vision très concrète des parcours de chacun : leurs motivations, la mise en action, les difficultés rencontrées, les joies comme les déconvenues, sans se départir de l’humour et du franc-parler qui accompagnent les rencontres avec tous ces acteurs de la transition.
C’est en janvier 2022 que débute l’aventure de ce média itinérant : Kern et Mélanie commencent à sillonner la France pour tourner une première série de reportages vidéo sur l’habitat alternatif. Changement de vie radical ou simple virage, toutes ces histoires de vie s’inscrivent dans une même dynamique et se concentrent sur des pratiques et des modes de vie moins carbonés, proches de la nature et solidaires.
L’incursion de la caméra de Kern au cœur de cette transition choisie est naturellement bienveillante mais revendique d’être transparente. Pas question d’occulter les difficultés rencontrées : vie en collectivité, argent, inclusion. « Des problèmes trop rarement évoqués dans l’approche un peu bisounours du thème de l’habitat collectif dans diverses sources consultées avant de monter notre projet ». 8 reportages composent de cette saison, diffusés gratuitement sur leur chaîne Youtube.
Avec un brevet en agriculture biologique pour Mélanie et des wwoofings pour Kern, le thème reliant l’agroécologie et l’alimentation soutenable, piliers de la transition écologique, s’est imposé pour la deuxième saison des Joies Sauvages, avec, toujours en filigrane, la prise en compte de l’empreinte carbone, du lien au vivant et de la solidarité. Pour la réaliser, ils ont reçu le soutien de notre dispositif Génération Climat.
« Au-delà, d’un financement, la FNH est une caution pour notre projet du fait de son expertise dans le domaine de l’agriculture et son plaidoyer pour défendre la transition alimentaire. Cela nous encourage à poursuivre dans cette voie pour toucher un maximum de gens car remplir son assiette concerne absolument tout le monde, alors rompre avec les anciens modèles, imaginer et en partager de nouveaux, c’est se positionner dans l’avenir ! »
2:30
Chaque parcours ou projet en permaculture, culture sur sol vivant, maraîchage bio, est le fruit d’un cheminement personnel. Pour le raconter, Mélanie et Kern ont passé du temps sur des fermes, ont gagné leur confiance, intégré leur quotidien et partagé des moments de vie pour les laisser exprimer différents points de vue.
Leur souhait pour cette deuxième saison : éviter les clivages entre les différentes pratiques agricoles, c’est à dire se frayer un chemin entre les idées noires et les fantasmes liés au retour à la terre, une vision de la nature fleur bleue et de ses images qui font vendre ! Car si l’agroécologie est une vraie alternative à l’agriculture conventionnelle et à l’élevage intensif, il existe aussi plusieurs obstacles pour la mettre en œuvre (au premier rang desquels l’accès aux terres, un problème d’ordre politique).
3 épisodes sur 8 ont déjà été filmés. Avec en moyenne 10 heures de rush par épisode à visionner, couper, monter, ils n’économisent pas leur temps ! Le conseil qu’ils donneraient à ceux qui se lancent dans un projet : « Ne pas s’emballer trop vite quand on est porté par l’excitation. Le terrain est et reste le meilleur moyen d’apprendre et de se confronter à la réalité. Il est plus enthousiasmant de garder des marges de progression que réviser ses ambitions à la baisse. »
Les témoignages de ceux qui mettent en place des pratiques vertueuses s’accompagneront de modules pédagogiques et d’infos concrètes traitant la question des enjeux alimentaires dans le fond. Toujours caméra à l’épaule, Kern et Mélanie abordent sur un ton léger ces sujets comme la saisonnalité, le locavorisme, l’empreinte carbone, les aliments contenus dans nos assiettes… Ce décryptage sous forme de vidéos de deux minutes, sera diffusé une fois par semaine.
A cela s’ajoute une animation quotidienne sur les réseaux sociaux pour fédérer une communauté et partager avec les abonnés les coulisses de la transition et le côté ludique des tournages version making-off !
Hors champ caméra, Kern et Mélanie organisent des projections débats dans les territoires visités pour permettre à la collectivité et surtout à ceux qui y ont contribué, mais n’ont pas accès au numérique, de visionner les reportages. Un moyen aussi de toucher la presse locale, de s’inscrire dans le paysage médiatique et de mobiliser le public au-delà d’internet
"Respecter le cadre européen, rien que le cadre européen », c’est sous cette condition qu’Elisabeth Borne a posé hier, au Salon de l’agriculture, les bases d’un plan de développement d’alternatives aux pesticides, ainsi que la construction d’un plan de financement associé. Pour que ce plan soit efficace, la FNH pose trois conditions de succès. Par ailleurs, alors que l’enjeu est de faire de la France un modèle d’exemplarité en matière de transition agricole et alimentaire, la FNH craint que ce renvoi au cadre européen conduise à niveler par le bas les ambitions de réduction des pesticides. Or, c’est parce que la France a eu toute latitude que nous avons par exemple pu interdire les néonicotinoïdes sur notre territoire.
Selon les derniers chiffres communiqués en novembre dernier, l’utilisation des pesticides en 2021 est au même niveau qu’en 2009, année du lancement du plan Ecophyto. Cet échec, la FNH l’a de nombreuses fois rappelé, s’explique par le manque cruel de financement. Dans notre rapport “Réduction des pesticides en France : pourquoi un tel échec”, paru en 2021, la FNH a ainsi mis en lumière que seul 1% des financements publics et privés aide vraiment les agriculteurs à réduire leur usage des pesticides. Le plan Ecophyto ne représente lui, que 0,3% des financements publics aux acteurs agricoles et alimentaires. Anticiper la sortie des pesticides et surtout accompagner massivement les agriculteurs dans la réduction de leur usage a toujours été l’urgence.
La FNH pose depuis plusieurs année, trois conditions pour un plan de financement réussi :
La Commission européenne oublie de légiférer sur les pesticides interdits en Europe qui y reviennent pourtant sous forme de denrées importées ou qu’elle produit elle-même pour l’exportation…
La Commission européenne a finalement publié, mercredi 22 juin, le règlement sur l’utilisation durable des pesticides (dit règlement SUR) qui doit fixer 50% de réduction de leur usage dans l’Union d’ici à 2030. La FNH et l’Institut Veblen saluent la publication tant attendue de cette proposition, qui ouvre le nécessaire débat démocratique sur la mise en oeuvre opérationnelle de la stratégie Farm to Fork. Cependant, il est incompréhensible que le règlement ne contienne aucun élément sur la question des importations de denrées agricoles et alimentaires, traitées avec des pesticides interdits en Europe, ni même sur les substances interdites dans l’Union, mais produites sur son territoire pour être exportées…
« Ces pesticides "hors de contrôle" se retrouvent dans les champs des producteurs des pays tiers et par boomerang dans l’assiette des consommateurs européens. Ils créent aussi une concurrence déloyale pour les agriculteurs français et européens. La Commission rate ainsi une opportunité majeure d’avancer sur la mise en oeuvre effective de « mesures-miroirs », pourtant acté comme une solution dans son rapport du 3 juin dernier. »
Alors que la Commission européenne a récemment affirmé la pertinence et la faisabilité juridique de la mise en place de mesures-miroirs, le règlement ne contient aucun élément sur la réciprocité des normes en matière d’utilisation de pesticides entre l’Europe et les autres marchés mondiaux. Une question pourtant centrale auxquelles nos organisations ont apporté une réponse en portant, depuis plusieurs mois, la mise en place de mesures-miroirs pour imposer aux produits importés les mêmes normes, notamment en matière de pesticides, que celles exigées aux agriculteurs européens.
La Commission aurait tout à fait pu saisir l’opportunité du règlement SUR pour abaisser les limites maximales de résidus (LMR) au seuil de détection pour tous les pesticides interdits par l’UE, avant une interdiction totale des substances et pratiques bannies par la réglementation européenne.
Le règlement SUR offrait aussi l’occasion de mettre fin à l’incohérence du cadre juridique européen en interdisant enfin la production, le stockage et l’exportation depuis l’UE de pesticides interdits par la réglementation européenne.
La FNH et l’Institut Veblen porteront des amendements sur ces points ces prochaines semaines.
La guerre en Ukraine remet sur le devant de la scène notre double dépendance énergétique et alimentaire et donc la question de la souveraineté et de la sécurité alimentaire. Or, pour atteindre celles-ci, les défenseurs de l’agriculture intensive militent pour une remise en cause de la stratégie européenne de « la Ferme à la Fourchette » qui prévoit une baisse de 50 % des pesticides d'ici 2030. Un retour en arrière dangereux qui continuerait de nous rendre dépendant et qui mettrait l’agriculture en risque.
La pandémie et maintenant la guerre menée par Vladimir Poutine, révèlent chaque jour un peu plus l’extrême vulnérabilité de la France et de l’Europe en matière d’énergie et d’alimentation :
La guerre russe en Ukraine a dopé une flambée en cours des prix de l’énergie. Par conséquent, le prix des engrais azotés de synthèse est passé de 250 euros à 800 euros la tonne, soit une multiplication par 3 depuis janvier 2021. La tonne de blé est aussi passée de 260 euros à 400 euros entre février et mars 2022.
A ce jour en France, la sécurité alimentaire n’est pas remise en cause car notre pays produit suffisamment de blé à destination de l’alimentation humaine et en exporte même. Mais la flambée des prix des intrants de synthèse, de l’énergie et des céréales rebat les cartes sur de nombreux plans. Elle entraine :
La crise alimentaire peut advenir et adviendra dans d’autres pays : en premier lieu en Ukraine, mais également chez ceux qui dépendent du blé russe et ukrainien à destination de la consommation humaine. 26 pays, principalement en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie, dépendent à plus de 50 % de de la Russie et de l’Ukraine pour leurs importations de blé. Le Liban par exemple importe 80 % de son blé d’Ukraine. Selon la FAO, 8 à 13 millions de personnes supplémentaires pourraient souffrir de faim à terme. Cela s’explique, dans l’immédiat, par des enjeux d’accessibilité économique aux denrées comme le blé par exemple qui voit son prix exploser. En fonction de la durée du conflit, la FAO s’attend à ce que l’indice des prix alimentaires passe de 8 à 20% au-dessus du niveau actuel déjà très élevé.
Dans ce contexte fortement déstabilisé, la FNSEA et les tenants du modèle agro-alimentaire majoritaire actuel utilisent le contexte géopolitique pour relancer leur demande d’abaissement des normes environnementales et sociales et incitent à produire plus. Ils refusent les objectifs européens ambitieux de la stratégie de « la Ferme à la Fourchette » (volet agricole du Pacte Vert), comme par exemple l’objectif d’atteindre moins 50% de pesticides en 2030 mais pas uniquement, les ambitions suivantes sont également jugées inacceptables : abandon progressif des élevages industriels, mise en jachère obligatoire de 4% de la surface agricole utile, interdiction d’usage des pesticides sur les surfaces d’intérêt écologique etc. Le candidat Emmanuel Macron a également annoncé jeudi 17 mars son intention de revoir la stratégie de « la Ferme à la Fourchette ».
Face à ce constat il est prépondérant de résoudre les problèmes à la racine en répondant aux enjeux suivants : accessibilité et souveraineté. Il nous faut donc pouvoir « produire différemment » afin d’assurer que toutes et tous les citoyen(ne)s, en France et dans le monde puissent décider de leur alimentation et avoir accès à une alimentation saine et durable… qui puisse profiter aux générations futures. 200 scientifiques ont expliqué dans une tribune publiée le 18 mars dernier, qu’une transformation de notre système alimentaire est plus que jamais nécessaire :
Diminuer l’usage d’intrants agricoles grâce à la mise en place de systèmes agroécologiques. Nous le voyons, les intrants agricoles (pétrole, pesticides, engrais azotés de synthèse) coûtent trop chers et nous en dépendons fortement vis-à-vis d’autres pays. Il est donc fondamental de baisser leur usage jusqu’à s’en passer si l’on veut assurer l’indépendance de nos productions vis-à-vis des énergies fossiles et des importations d’intrants. Et cela est possible grâce à la mise en place d’un système agroécologique en France, en UE et dans les pays du monde entier :
Réduire la place des protéines animales dans nos productions. Nous importons trop de céréales pour l’alimentation animale, ayant des répercussions sur les coûts de production des élevages et les prix alimentaires. Il est donc nécessaire de réduire grandement la place des protéines animales dans nos productions, et dans notre consommation et revaloriser l’élevage durable plus autonome en matière d’intrants et d’alimentation animale.
Remettre à pâturer les animaux dans des prairies riches en légumineuses : face à la dépendance aux engrais de synthèse et à l’alimentation animale produit majoritairement à base de gaz russe et norvégien, deux solutions :
Réduire la place des cultures énergétiques : face à l’incertitude d’un manque de disponibilité de denrées à venir sur le moyen terme, il est fondamental de prioriser la production alimentaire sur les terres agricoles. Les cultures énergétiques tel que cultivées et utilisées doivent cesser.
Faire vivre la souveraineté alimentaire. Il est fondamental de se poser la question de l’impact de nos échanges commerciaux avec le reste du monde. Notre exportation subventionnée procure une véritable concurrence déloyale vis-à-vis des agriculteurs des pays importateurs. Il s’agit donc à la fois de supprimer les mécanismes de subventions aux exportations et de permettre à chaque pays ou groupe de pays de mettre en place des politiques agricoles et alimentaires comme l’Europe l’a fait en son temps.
Faudra-t-il produire plus pour nourrir les 9,5 milliards d’habitants sur terre en 2050 ? Une agriculture sans pesticides pourrait-elle relever le défi ? Est-ce vraiment possible de réduire notre consommation de viande sans mettre en péril les éleveurs français ? Alors qu’en France l’agriculture est le deuxième secteur le plus émetteur, que la biodiversité s’effondre et que nos agriculteurs ne parviennent plus à vivre décemment de leur travail, nous démêlons le vrai du faux sur l’avenir de notre modèle agricole et alimentaire avec Marc Dufumier, agronome, enseignant-chercheur à AgroParis Tech et membre du Conseil scientifique de la FNH.
❌ Faux. Les problèmes de la faim dans le monde n’ont rien à voir avec un manque de nourriture. Il est tout à fait possible de nourrir la planète entière sans pesticides puisqu’on produit déjà suffisamment de nourriture. Le vrai problème réside dans la répartition des revenus pour avoir accès à l’alimentation.
Quelques chiffres éclairants :
Les cultures spécialisées des pays en développement (café, cacao, banane, soja…), au détriment des cultures vivrières, ont non seulement rendu maints pays dépendants de l’occident pour leur alimentation, mais elles ne leur permettent pas non plus de dégager des revenus suffisants pour acheter de quoi se nourrir.
Les pays riches, quant à eux, captent tous les surplus, nourrissent des animaux en surnombre, (à noter qu’il faut entre 3 et 10 calories végétales pour produire une calorie animale), consomment des agrocarburants et gaspillent à tout va, tout en détruisant la planète avec un modèle agricole très énergivore, polluant et qui, s’il a permis d’accroître la production pour répondre à la pénurie d’après-guerre, est aujourd’hui obsolète, s’insurge Marc Dufumier.
❌ Faux. La réponse tient en un mot : l’agroécologie. Là où l’agriculture conventionnelle spécialisée a uniformisé, simplifié et pour finir appauvri et fragilisé les écosystèmes, l’agroécologie permet de redynamiser les territoires : on n’éradique plus les adventices (mauvaises herbes), ravageurs et autres agents pathogènes, mais on vit avec et on minore leurs prolifération et les dommages. Comment ? En conservant une grande biodiversité végétale et animale, sauvage et domestique, et en jouant des interactions que les uns et les autres entretiennent dans ces riches écosystèmes. C’est en maintenant une dynamique de la diversité dans les agrosystèmes, et bien sûr sans pesticides, qu’un équilibre se crée et que l’on réduit les risques de virus, maladies et autres ravageurs.
❌ Faux ! L’agroécologie a pour objectif de tirer le meilleur parti d’un milieu pour accroître les rendements à l’hectare sans avoir à étendre les surfaces cultivées (autrement dit déforester, assécher des zones humides…). C’est une discipline scientifique éminemment rigoureuse et novatrice, qui est en mesure d’aider les pays du sud à retrouver leur autonomie alimentaire, d’autant plus qu’ils bénéficient souvent de conditions très favorables pour produire intensivement à l’hectare : la lumière du soleil, ressource renouvelable et gratuite et le carbone du gaz carbonique de l’atmosphère pour fabriquer les glucides et les lipides de l’alimentation, via la photosynthèse. L’azote de l’air que des légumineuses peuvent intercepter pour produire des protéines végétales et dont elles vont, par voie biologique, fertiliser le sol et profiter aux céréales comme le mil ou le sorgho qui ne captent pas l’azote de l’air.
L’important est de bien gérer l’usage des eaux de pluie, en mettant des obstacles à son ruissellement et en favorisant son infiltration dans les sols. Pour que ceux-ci soient suffisamment poreux, on peut compter sur les vers de terre, les termites et la biologie des sols. Des matières organiques (fumier) grâce à l’association étroite de l’agriculture élevage, des arbres dont les racines profondes sont capables d’extraire du sous-sol des éléments minéraux issus de l’altération des roches mères et de les restituer dans les couches de surface quand les feuilles mortes se décomposeront au sol. Des arbres et arbustes encore pour héberger toute une petite faune d’oiseaux, mammifères et autres auxiliaires participant à la régulation des insectes ravageurs et des maladies.
L’agroécologie montre ainsi qu’en tirant profit du vivant, avec une utilisation optimisée des ressources naturelles, il est possible de créer et de maintenir une couverture végétale dense et permanente et d’associer étroitement les cycles du carbone et de l’azote afin d’optimiser les rendements sur une surface réduite.
✅ Vrai sur le court terme, faux sur le moyen terme. Le seul moment où le consommateur peut prétendre acheter « bon marché » c’est au supermarché en remplissant son caddie de produits à bas prix, mais le passage « à la caisse » ne s’arrête pas là. Il faut pour rétablir le coût réel d’une alimentation issue de l’agriculture industrielle y ajouter directement tous les coûts cachés : l’argent de nos impôts dépensé pour dépolluer l’eau des intrants chimiques, dont l’atrazine par exemple, lutter contre la prolifération des algues vertes due à l’épandage du lisier provenant de l’élevage intensif d’animaux hors sol, assumer les coûts sur la santé induits par la multiplication des cancers, parkinson, obésité et autres perturbateurs endocriniens, sans oublier bien sûr l’altération en général des paysages en terme de bien-être ou encore les impacts à durée indéterminée sur le climat et la biodiversité.
❌ Faux. Certes l’agriculture biologique a un coût supérieur en main d’œuvre car elle est plus soignée, plus artisanale, plus complexe. Exigeante en temps, elle demande un savoir faire et des connaissances agronomiques, mais n’est-ce-pas les raisons qui justement motivent ceux qui ont envie de se réapproprier leur métier et d’être fiers de produire une alimentation saine pour la santé des hommes et respectueux de l’environnement.
Par ailleurs, rappelons que les pays riches, comme la France, peuvent se permettre de diminuer leurs rendements pour produire une nourriture de meilleure qualité. En économisant sur les coûts en engrais, en pesticides et en énergie fossile (carburants), cultiver en bio permet de gagner en valeur ajoutée à l’hectare. Par ailleurs, il serait bon de rappeler que les agriculteurs en bio contribuent à la réduction de l’effet de serre par la séquestration du carbone, qu’ils replantent des haies, dépolluent les sols et en restaurent la fertilité, favorisant le retour de la biodiversité, et qu’ils devraient, pour ces services rendus à l’environnement, et donc d’intérêt général pour la société toute entière, être rémunérés par l’argent des contribuables. Un levier financier pour compenser le manque à gagner induit par le temps de conversion et la certification. Une rémunération qui récompense leur savoir-faire et reconnaît leur participation à la transition agricole et alimentaire.
❌ Faux. Là encore il faut remettre en perspective les conséquences directes de la surconsommation de viande sur la santé humaine et sur l’environnement et les différents modes d’élevage. Là où l’élevage intensif a des effets délétères à tous points de vue sur la santé, sur l’environnement (pollution aux nitrates responsables de la prolifération d’algues vertes sur le littoral breton, émissions de méthane, un puissant gaz à effet de serre, déforestation importée à cause du soja dont sont nourris vaches, cochons et volaille, et sans oublier le bien-être animal), les exploitations avec un cheptel réduit, élevé à l’herbe, se révèlent au contraire bénéfiques au milieu, puisque les sols et particulièrement les prairies comptent parmi les principaux milieux de stockage naturels de carbone et participent à la biodiversité et au maintien de paysages ouverts.
❌ Faux. Il y a une appétence pour le métier d’agriculteur et agricultrice. Pour preuve, près d’un tiers de nouveaux installés ne le font pas dans le cadre familial. Mais on ne peut parler d’agriculture aujourd’hui sans mentionner les difficultés liées au métier voire l’immense détresse de certains agriculteurs. C’est en effet une profession qui compte parmi les plus importants taux de suicide (perte de sens, surendettement, pression pour produire toujours davantage à des prix toujours plus tirés vers le bas).
La question de la transmission des terres est un vrai enjeu : 45% des agriculteurs partiront à la retraite dans les 6 ans. Selon le dernier rapport de Terres de Lien, 5 millions d’hectares, soit 20% de la surface agricole française vont changer de main d’ici 2030.
Si les débouchés de l’agriculture conventionnelle et la distorsion de concurrence (induite notamment par les traités de libre-échange) découragent certains de reprendre l’exploitation familiale, c’est surtout le difficile accès aux terrains qui est en cause.
Il existe bel et bien des candidats souhaitant reprendre des terres pour développer des formes d’agriculture alternatives (maraîchage en circuit court, transformation fromagère et appellations protégées…), mais c’est un parcours du combattant. La concentration des terres avec des fermes de plus en plus grandes tournées vers une production de masse se poursuit et les nouveaux agriculteurs ne disposant pas d’un capital suffisant ne peuvent prétendre rivaliser avec ces grandes unités de production lorsqu’il s’agit de se positionner pour reprendre les terres de ceux qui partent à la retraite.
Le problème est politique et il appelle une réponse politique : aider les jeunes et moins jeunes à s’installer c’est mettre avant tout mettre fin à la spéculation foncière et redonner du pouvoir aux SAFER (société d’aménagement foncier et d’établissement rural). Réorienter les aides de la politique agricole commune et notamment cesser de conditionner leur montant à l’hectare.
Très bon vulgarisateur, et prof captivant à en croire ses élèves, Pierre-Henri Gouyon a le sens de la formule et s’exprime sans détour. Ingénieur agronome de formation, titulaire entre autres d’une thèse en écologie et d’un DEA en philosophie, professeur au Muséum National d’Histoire Naturelle depuis 2005, Pierre-Henri rejoint notre Fondation il y a 16 ans. Il en devient vite l’un des piliers. Rencontre avec cet expert du vivant qui a fait de la lutte contre les pesticides son principal combat.
Répondant à l’appel d’Hélène Leriche, alors conseillère scientifique et responsable biodiversité à la FNH, Pierre Henri Gouyon rejoint le comité de veille écologique de la FNH en 2006 en tant qu’expert pour participer à la rédaction du « pacte écologique ». Un programme d’actions ambitieux qui identifie clairement 10 objectifs écologiques prioritaires dans tous les domaines (économie, énergie, agriculture, préservation des terres, transport, fiscalité, biodiversité, santé, recherche et politique internationale) et propose des mesures concrètes et rapides à mettre à œuvre pour les atteindre. « Un moment très fort dans la vie de la Fondation », se souvient-il, une révolution même puisque le pacte écologique a su inviter l’écologie dans le débat public imposant aux candidats à la présidentielle de s’engager à agir.
Pierre-Henri Gouyon se souvient notamment de Ségolène Royal qui, reprenant une des propositions concrètes du pacte, s’était engagée à nommer un « vice-premier ministre pour l’écologie ». Et de Nicolas Sarkozy qui, aussitôt après son élection, les convoque, lui et une dizaine d’autres experts pour organiser ce qui deviendra le Grenelle de l’Environnement.
Pierre-Henri Gouyon revient, sans l’éluder, sur ce moment difficile qu’il a vécu au sein de la Fondation : une période où les climato-sceptiques contestent le bien-fondé de toutes les théories concernant le réchauffement climatique. Claude Allègre, à la tête de la Fondation Écologie d’Avenir (hébergée à l’Académie des sciences) en est le plus virulent représentant, accusant le comité de veille écologique de la FNH d’être « un peu léger » et questionnant sa légitimité à produire des études sérieuses. Un constat qui relève davantage de considérations politiques et d’intérêts contraires au bien commun pour ce fervent défenseur des OGM et dont la Fondation citée plus haut ne compte qu’un seul écologiste dans ses rangs.
Prenant la critique à contre-pied, la FNH va dissoudre le comité de veille écologique. Amandine Lebreton, directrice plaidoyer et prospective, et sa prédécesseur Marion Cohen, Pierre-Henri Gouyon évoque cette mue et la constitution du conseil scientifique comme sa plus importante contribution au sein de la Fondation. Il assure la présidence de cette nouvelle entité et propose que ce conseil « se monte avec des scientifiques reconnus et incontestables », dont le contenu des travaux sera vérifiable, chiffré et inattaquable.
Aujourd’hui, après Dominique Bourg et Alain Grandjean, c’est Marie-Anne Cohendet qui préside ce conseil toujours constitué d’une trentaine de scientifiques couvrant l’ensemble des disciplines (sciences de la matière et du vivant, sciences sociales et humaines) dont les compétences et la complémentarité des savoirs permet à la Fondation de produire des dossiers de fond sur les sujets clés de l’écologie et de proposer des feuilles de routes à destination des décideurs politiques pour opérer la transition écologique. Pierre-Henri accompagne régulièrement la FNH dans son action pour réduire l’utilisation des pesticides qu’il considère comme premiers responsables de la disparition de la biodiversité.
"Le problème numéro 1, c’est les pesticides" assène t-il, "il faut maintenir la biodiversité dans les champs, et pas seulement dans les bois !". Si ses recherches en biologie évolutive n’étaient pas spécifiquement centrées sur cette problématique auparavant, Pierre-Henri Gouyon reconnaît se focaliser aujourd’hui sur les pesticides, réfutant l’argument multifactoriel asséné par tous les marchands de doute à l’œuvre pour détourner l’attention des vraies causes de l’effondrement de la biodiversité.
Depuis qu’il en a fait son combat, Pierre-Henri Gouyon n’a de cesse d’alerter sur le préjudice irréversible que sont la réduction de la biomasse et la disparition des écosystèmes. Sa contribution au dernier rapport de notre Think Tank « Réduction des pesticides en France « pourquoi un tel échec ? », publié en Février 2021, a été capitale. À l’étude factuelle et chiffrée du rapport - seul 1% des financements publics alloués aux acteurs de l’alimentation (soit 23,2 milliards d’euros), est destiné à réduire l’usage des pesticides – il apporte un éclairage expert sur l’indéniable responsabilité de notre modèle agricole et sur l’effet majeur des pesticides dans la crise de la biodiversité, loin devant la cause climatique.
Invité à représenter la FNH dans le cadre d’un débat sur les pesticides lors du congrès de l’UICN le 4 septembre dernier, Pierre-Henri Gouyon est ainsi revenu sur la notion même de biodiversité.
Il s’agit d’une des conséquences du fonctionnement évolutif du monde vivant découvert par Darwin et qui constitue le centre des recherches de Pierre-Henri Gouyon. Le problème, nous explique-t-il, c’est que nous sommes programmés culturellement pour percevoir le monde vivant comme créé une fois pour toutes : le mythe de l’équilibre. Il démontre ainsi que la biodiversité est au contraire une dynamique constante, sculptée par l’apparition et l’extinction de nouveautés au sein même des lignées évolutives et qu’elle ne peut être un équilibre stable. Au contraire, c’est si on tente d’en arrêter le mouvement qu’on provoque sa chute, image à l’appui du vélo qui tombe s’il n’est pas en mouvement !
Un préambule qui remet en perspective l’importance capitale de changer nos pratiques agricoles en luttant avant toute chose contre l’homogénéisation des plants et des semences qui retirent toute résistance aux cultures et, de ce fait, obligent à l’emploi de doses de plus en plus démentielles de pesticides (majoritairement fongicides, insecticides et herbicides).
Ces derniers, en agissant sur le fonctionnement de base des champignons (moisissures), des insectes et des plantes, sont toxiques pour l’ensemble du vivant, d’autant qu’ils sont systématiquement utilisés en prévention (semences enrobées) et non plus au cas par cas. Les pesticides sont ainsi la première cause de l’effondrement de la biodiversité suivis par la destruction des milieux et la surexploitation. Loin devant les changements climatiques et les espèces invasives. Pour illustrer son propos Pierre-Henri Gouyon avance un chiffre éloquent : 75% de la biomasse des insectes a disparu en trente ans dans les zones protégées en Europe.
Pourquoi ? Les enjeux sont diffus, moins facilement perceptibles que ceux du climat qui produisent des phénomènes extra-ordinaires au vrai sens du terme : canicule, sécheresse, inondation, tempête… Pourtant les conséquences n’en sont pas moins dramatiques, alerte Pierre-Henri Gouyon. Déjà, l’effondrement de la biodiversité se traduit par des maladies émergentes comme la maladie de Lyme et sans doute le COVID. En gros, si nous éliminons toutes les formes de vie sauf nous et les espèces qui nous sont utiles, toutes les maladies du monde se concentreront sur ces espèces et les catastrophes sanitaires et agronomiques se succéderont. Nous les combattrons à grand renfort de chimie ce qui ne fera qu’accentuer le problème…
« La perte de diversité des plants représente un risque majeur de voir apparaître des épidémies très destructrices menaçant la production alimentaire, et pouvant provoquer de réelles famines. » prévient-il encore. La diversité au contraire résout le problème puisque la nature sélectionne les individus résistants ce qui assure la pérennité des populations.
Et les solutions existent : produire des semences paysannes et remettre en œuvre une dynamique de la diversité dans les agro-systèmes, le grand drame étant la dépendance de l’agriculture vis-à-vis des lobbies de l’industrie chimique et biotechnologique, ainsi que la scission entre l’élevage et la culture. Et pour finir sur une note positive, rappelons qu’il est plus facile d’agir rapidement en éliminant les pesticides que de compter sur les effets de la reforestation qui prend des années…
Le 10 février, dans le cadre de la Présidence française de l’Union européenne, la Fondation pour la Nature et l’Homme, INTERBEV et l’Institut Veblen appellent trois ministres européens, dont Julien Denormandie, et 10 eurodéputés à débattre des mesures miroirs. Objectif : entraîner la Commission européenne sur l’application de ce principe, pour que les denrées alimentaires importées respectent enfin les mêmes normes sanitaires, environnementales et sociales que les denrées produites en Europe. Une condition indispensable pour permettre d’accélérer la transition écologique et mettre fin à la concurrence déloyale subie par les agriculteurs européens.
Cet événement intervient suite à la publication de notre rapport « Mondialisation : comment protéger nos agriculteurs et l’environnement » qui pointe la nécessité de mesures-miroirs pour assurer une réciprocité des normes de productions aux partenaires commerciaux de l’UE. En 2022 la France préside le Conseil de l'Union européenne pendant 6 mois. Elle a donc un rôle clé à jouer dans l'adoption de ce nouveau règlement qui vise à protéger l'environnement, les agriculteurs et la santé des Européens.
Jeudi 10 février 10:15-12:15 / The Merode, Bruxelles
Possibilité de participer physiquement ou en ligne
En matière de durabilité, la clé de la réussite des politiques publiques européennes réside dans un maître mot : la cohérence. Sur le plan de l’alimentation, l’Union européenne a le devoir de mettre en cohérence ses différentes politiques : agricole, environnementale et commerciale.
C’est sur cet enjeu de réciprocité, « grande cause » de la Présidence française de l’Union que nous organisons cette discussion cruciale, avec pour objectif d’établir ensemble les standards de production à imposer pour accéder au marché européen.
Nous débattrons avec des représentants de la société civile européenne, des ministres, des eurodéputés, des scientifiques, des avocats, ainsi qu’avec des membres de l’OMC. S’exprimeront notamment :
La FNH sera représentée par :
Aliments traités à l’atrazine, bœuf aux antibiotiques… aujourd’hui, il est tout à fait légal que des denrées agricoles issues de pratiques interdites en Europe entrent sur le marché européen. Cela concerne l’utilisation de pesticides, les conditions d’élevage, les normes de bien-être animal, les normes sanitaires et les conditions de travail. Les conséquences sont dramatiques :
Exiger aux denrées importées les mêmes normes sanitaires, sociales et environnementales qu’aux denrées produites en Europe, tel est l’objectif de notre proposition de mesures-miroirs rendue publique en mars dernier. Six mois après, elle gagne du terrain auprès d’eurodéputés et du gouvernement français, qui s’engagent à la porter auprès de l’Union européenne.
Dans un rapport réalisé avec l’Institut Veblen et Interbev, paru en mars dernier, nous démontrons pourquoi adopter ce règlement est à la fois indispensable pour stopper la concurrence déloyale qui étouffe le monde agricole et préserver le climat et l’environnement. Le 15 juillet dernier, nous avons invité des eurodéputés de différents groupes politiques sur une exploitation afin de travailler sur l’application de ces mesures-miroirs dans les prochains textes européens. La présidence française de l’UE qui débute le 1er janvier 2022 nous en offre l’occasion. Retour sur une rencontre qui s’est avérée fructueuse…
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Lentilles au glyphosate, bœuf nourri aux farines animales… L’Union européenne importe des denrées alimentaires issues de pratiques interdites en Europe et cela en toute légalité. Les conséquences :
L’absence de réciprocité dans les normes a encouragé l’augmentation des importations : + 28% en 15 ans. En France, 50% de nos fruits et légumes sont importés, au détriment de la production locale. Les eurodéputés Anne Sander, Arnaud Danjean (Parti populaire européen), Marie-Pierre Vedrenne, Jérémy Decerle (Renew) et Benoit Biteau (Les Verts) l’ont bien compris : mettre en place des mesures-miroirs est une urgence totale pour accélérer la transition écologique et sauver les agriculteurs européens.
Le témoignage de Guillaume Perrot, éleveur en Bourgogne Franche-Comté et les deux heures de discussion entre les eurodéputés, la FNH, l’Institut Veblen et Interbev, ont porté leurs fruits : tous les 5 s’engagent à pousser des mesures-miroirs lors de la présidence française de l’UE et dans les textes qui seront votés prochainement notamment :
Par ailleurs, les eurodéputés Eric Andrieu, Sylvie Guillaume et Raphaël Glucksmann du groupe S&D ont rejoint les 5 eurodéputés déjà engagés, pour signer à nos côtés une tribune parue dans le Monde. Nous y soulignons l'importance de mettre en place cette protection essentielle pour les agriculteurs et l'environnement, que sont les mesures-miroirs.
« Les mesures-miroirs sont importantes pour deux choses : pour introduire plus de durabilité ailleurs qu’en Europe, tirer vers le haut d’autres pays sur les mêmes standards de l’Union européenne, qui elle est déjà très engagée. Aussi pour nos agriculteurs : il ne faudrait pas qu’ils se retrouvent en distorsion de concurrence face au reste du monde ». Anne Sander, eurodéputée groupe Parti populaire européen
« Aujourd’hui, avec les mesures-miroirs, nous avons des propositions bien construites, intéressantes techniquement et juridiquement, qui permettront de progresser. » Arnaud Danjean, eurodéputé groupe Parti populaire européen
« Le président de la République et le ministre de l’Agriculture en ont pris l’engagement. On va faire en sorte de leur rappeler cet engagement pour que ces mesures-miroirs avancent pendant la présidence française de l’Union européenne qui commence début janvier 2022. » Benoît Biteau, eurodéputé groupe Les Verts
« On voit qu’il y a une communion à l’échelle française, maintenant nous devons convaincre à l’échelle européenne et trouver les voies et les moyens pour faire en sorte que ce positionnement-là devienne celui de toute l’Union européenne. » Marie-Pierre Vedrenne, eurodéputée groupe Renew
« On vient de renégocier une réforme de la PAC pour l’agriculture européenne de prochaines années et cela paraît donc important, au vue des règles que nous avons remises en place, de faire en sorte que ce qui sera fait par les agriculteurs européens ne soit pas pénalisé par une production agricole venant d’autres pays. » Jérémy Decerle, eurodéputé groupe Renew
Notre politique commerciale doit porter des clauses miroirs sur le plan climatique et sur le plan de la biodiversité. Cela, c'est ce que je veux que la présidence française, aux côtés de nos partenaires avec la Commission, puisse porter. Nous devons réinventer nos politiques commerciales pour qu'elles soient cohérentes avec nos politiques climatiques, avec nos politiques de biodiversité. C'est une nécessité.
As agreed during the CMO negotiations, the Commission will present present, at the latest in June 2022, a report containing an assessment of the rationale and legal feasibility of applying EU health and environmental standards to imported agricultural and agri-food products /1 pic.twitter.com/LDIP0u0YuV
— Janusz Wojciechowski (@jwojc) September 6, 2021
La biodiversité est un processus dynamique qui s’effondre à une vitesse remarquablement élevée depuis trente ans. 80% de la biomasse des insectes dans les zones protégées de l’Europe a disparu en peu de temps et les colonies d’abeilles se sont effondrées. Pourtant l’action publique n’est pas au rendez-vous. Et pour cause, dans bien des cas, il est affirmé que les causes sont multifactorielles et qu’il faut faire plus de recherche. Une déclaration qui satisfait facilement la communauté scientifique. Dans ce point de vue incisif, Pierre-Henri Gouyon, biologiste, souligne l’influence majeur des marchands de doute sur le système de recherche scientifique et leur capacité à détourner les regards de causes pourtant évidentes, et dans le cas présent, des pesticides...
Le 15 décembre 1953, à New York, a eu lieu une réunion qui a lancé une nouvelle ère dans les relations entre les entreprises et les citoyens du monde entier. Les spécialistes des « relations publiques » ont commencé à devenir des « ingénieurs sociaux » et certains d’entre eux sont devenus des spécialistes de la désinformation scientifique, les « marchands de doute ».
Les spécialistes des « relations publiques » ont commencé à devenir des « ingénieurs sociaux » et certains d’entre eux sont devenus des spécialistes de la désinformation scientifique, les « marchands de doute »1. En effet, lors de cette réunion, John Hill, de la firme de relations publiques Hill & Knowlton, a expliqué aux grandes compagnies de tabac que « le simple fait de nier les risques pour la santé ne suffirait pas à convaincre le public. Une méthode plus efficace consisterait plutôt à créer une controverse scientifique majeure dans laquelle le lien scientifiquement établi entre le tabagisme et le cancer du poumon ne semble pas être connu de façon concluante ». La conspiration qui a commencé à ce moment-là a eu un énorme succès, comme l’a montré Robert N. Proctor
Comme le montrent Oreskes & Conway, la même stratégie a été appliquée au déni du changement climatique au début du XXIe siècle. Ce qui sera montré ici est son application aux questions écologiques. Autrement dit, les entreprises agrochimiques ont occulté les liens entre leurs produits et l’effondrement de la biodiversité. Ce point a fait l’objet d’une enquête par les journalistes Stéphane Foucart & Stéphane Horel et le sociologue Sylvain Laurens. Une nouvelle science est apparue : l’agnotologie qui étudie l’ignorance et les moyens de la faire ou de la défaire. Les scientifiques qui travaillent dans des domaines où ces processus s’appliquent ne peuvent plus ignorer cette branche de la sociologie, ce qui s’applique entièrement aux études sur la biodiversité.
En effet, un premier livre sur l’implication majeure des pesticides en ce qui concerne le déclin de la biodiversité a été publié par Rachel Carson en 1962. Elle a insisté à juste titre sur la menace d’extinction de nombreuses formes de vie due aux pesticides. Son argument a sans aucun doute convaincu de nombreux environnementalistes et a conduit à l’interdiction du DDT. Mais elle a eu très peu d’effets sur l’utilisation des pesticides et n’a pas empêché l’utilisation massive de centaines d’autres molécules, y compris encore plus nocives. Soixante ans plus tard, la quantité de pesticides utilisés a considérablement augmenté et le déclin de la faune devient de plus en plus évident, comme le démontre le rapport de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES)8. L’IPBES est présentée comme « l’organe intergouvernemental qui évalue l’état de la biodiversité et des services écosystémiques qu’elle fournit à la société, en réponse aux demandes des décideurs ». Dans son rapport, on peut lire ceci :
« Le taux de changement global de la nature au cours des 50 dernières années est sans précédent dans l’histoire de l’humanité. Les moteurs directs du changement dans la nature ayant le plus d’impact mondial ont été (à commencer par ceux qui ont le plus d’impact) les changements dans l’utilisation des terres et de la mer, l’exploitation directe des organismes, le changement climatique, la pollution et l’invasion d’espèces exotiques. » Fait intéressant, ici, alors que les prédictions faites par Rachel Carson sont avérées, les causes invoquées sont multiples et le mot pesticides n’apparaît pas directement comme une cause majeure. L’effondrement de la biodiversité est attribuable à de multiples causes, tout comme le cancer du poumon. Et dans les deux cas, les ingénieurs sociaux ont fait en sorte que cela soit reconnu. En effet, soixante-dix ans après cette rencontre marquante entre les Relations Publiques et Big Tobacco à New York, les techniques d’ingénierie sociale ont progressé mais la stratégie fondamentale est restée inchangée : Convaincre la communauté scientifique et les parties prenantes que le problème est dû à des causes multifactorielles et que davantage de recherches sont nécessaires.
1% des financements publics est réellement efficace...Dans un rapport inédit, le Think tank de la Fondation pour la Nature et l'Homme met en évidence le déficit d’accompagnement des agriculteurs et agricultrices par les financements publics et privés.
Parmi les principaux pays utilisateurs de pesticides en Europe, la France ambitionne d’en réduire l’usage de 50% à horizon 2025. Pourtant, le recours à ces produits a augmenté de 25% en 10 ans. Pour comprendre les raisons d’un échec qui ne dit pas son nom, le Think tank de la FNH s’est intéressé aux financements publics et privés perçus par les acteurs agricoles et alimentaires au cours des 10 dernières années : Quels sont-ils ? Où vont-ils ? Concourent-ils vraiment à accompagner les agriculteurs vers la réduction drastique des pesticides ? Un travail mené durant 1 an avec le Basic aboutit à une conclusion sans appel : depuis 2008, la France a donné au monde agricole de grands objectifs à atteindre sans lui en donner les moyens.
Contribution
Réduction des pesticides en France : pourquoi un tel échec ?
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Le Think tank de la FNH a réalisé le premier panorama des financements publics versés aux acteurs de l’alimentation. Il en ressort un chiffre inédit à ce jour : ils perçoivent 23,2 milliards d’euros par an, qui comprend les financements publics dont la PAC, mais aussi les dispositifs d’allègements fiscaux dont bénéficient les acteurs économiques.
Le rapport montre que sur ces financements conséquents, seuls 11% ont pour intention de répondre à l’objectif de réduction des pesticides. Mais la réalité est bien pire. En réalité, seul 1% y contribue de manière avérée ! Un comble en termes d’efficacité de l’usage de l’argent public alors même que la nécessité de réduire l’utilisation des pesticides est dans toutes les bouches, et que les résultats des politiques menées depuis 10 ans sont catastrophiques : +25% d’usage des pesticides entre 2009 et 2018.
La conclusion est claire : les pouvoirs publics donnent au monde agricole des objectifs de réduction de l’usage des pesticides, aussi nécessaires qu’ambitieux, sans lui donner les moyens de les atteindre. Cela est d’autant plus inacceptable que les marchés agricoles et alimentaires ne rémunèrent pas suffisamment la production agricole.
Évalués à 19,5 milliards d’euros par an, les financements issus des acteurs privés - banques, coopératives agricoles… - pèsent à peu près autant que les financements publics. Ils se trouvent essentiellement sous forme de prêts qui sont davantage mobilisés par les exploitations agricoles les plus utilisatrices de pesticides (60% d’emprunts de plus que les exploitations les moins intensives en pesticides).
Concernant les autres acteurs de la chaîne alimentaire étudiés, 85% des emprunts bancaires par les industries agroalimentaires sont majoritairement contractés par les grandes entreprises et entreprises de taille intermédiaire*. Or, la majorité du chiffre d’affaires de ces entreprises est associée à des produits issus de matières agricoles “conventionnelles”, utilisatrices de pesticides.
Ainsi malgré un contexte d’incitation à la réduction de l’usage des pesticides, les financeurs privés restent passifs et alimentent in fine le statu quo.
La double analyse public/privé met également en évidence que le poids de l’échec est trop souvent mis sur les épaules des agriculteurs, alors que la responsabilité est bien du côté des pouvoirs publics et de l’ensemble des acteurs agricoles et alimentaires.
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Le rapport démontre également que le groupe des agriculteurs les plus utilisateurs de pesticides (9% des exploitations agricoles et 7% de la surface agricole utile) a augmenté sa consommation de 55% en 10 ans. Cette évolution s’explique essentiellement par la croissance de cet ensemble d’exploitations agricoles (en termes de nombre d’exploitations comme de surface agricole). Autrement dit, les plus gourmands en pesticides, toujours plus nombreux et plus grands, tirent les chiffres de consommation vers le haut. En corollaire, les exploitations les moins utilisatrices de pesticides ont réduit leur consommation de 1% en 10 ans; elles occupent 31% de la surface agricole mais voient leur nombre diminuer.
Entre les deux, il apparaît que 57% des exploitations se situent dans la moyenne des consommations et se trouvent à la croisée des chemins. Pour elles, les prochaines années seront déterminantes car elles semblent se trouver sur une ligne de crête.
Ainsi, les exploitations faiblement à moyennement utilisatrices représentent 91% des exploitations agricoles. Ce sont bien elles, en priorité, que les pouvoirs publics doivent accompagner pour faire pencher la balance du bon côté: leur donner un cap et des perspectives, sécuriser leur transformation, assurer la rémunération des systèmes agricoles vertueux et booster les installations et transmissions en agroécologie. Ce dernier point est clef : dans 10 ans, la moitié des agriculteurs seront partis à la retraite. Le renouvellement des générations est donc clé pour atteindre les objectifs écologiques. La France doit se donner pour objectif 100% d’installations en agroécologie dans 10 ans.
La cohérence des politiques publiques et l’engagement des acteurs privés ne serviraient pas seulement la cause de la biodiversité. Ce serait le fondement d’un nouveau contrat entre l’agriculture et la société, mettant fin à la dissonance historique entre les objectifs assignés à l’agriculture et les moyens qu’on donne aux acteurs pour y répondre.
Contribution
Étude des financements publics et privés liés à l’utilisation agricole de pesticides en France
Télécharger la contribution (format pdf - 5 Mo)Sources
* De plus de 250 salariés
Parfois perplexe devant les rayons au moment de faire vos courses ? Au quotidien, pas toujours facile de faire les bons choix. Les fruits et légumes, faut-il les choisir bio importés ou locaux en agriculture dites conventionnelles ? On vous aide à y voir clair.
Le bio a un net avantage sur le conventionnel : il est meilleur pour la santé car il ne contient ni pesticides, ni intrants chimiques. En monoculture, le conventionnel appauvrit les sols et doit avoir recours aux engrais et autres traitements pesticides pour maintenir des rendements élevés. Ces intrants nous empoisonnent et dégradent l'environnement.
Le bio importé nécessitant un transport par avion, du stockage et de la réfrigération depuis le bout du monde (pour exemple : citrons d'Amérique du sud et haricots verts d'Afrique) a un bilan carbone bien plus lourd qu'une production Française en conventionnel et en régions.
Par contre, les produits locaux en conventionnel, s'ils sont vendus hors saison sont à leur tour plus émetteurs de gaz à effet de serre. Prenons l'exemple des tomates : même vendues en circuit court mais cultivées l'hiver, en Bretagne, sous serre chauffée, elles affichent un bilan carbone supérieur à celui de l'importation et du transport depuis les pays du sud de tomates bio produites à l'air libre.
Conclusion : Il ne faut acheter que des fruits et légumes de saison. Et la culture biologique n'est vraiment écologique que si elle reste dans une démarche locale ET saisonnière.
Pour approfondir le sujet